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Casimir Diawara : « la négociation a été toujours l’arme la plus puissante des syndicats »

Le secrétaire général du ministère de l’éducation nationale et de l’alphabétisation (MENA) appelle le syndicat guinéen à privilégier le dialogue et les négociations dans leur mouvement de revendication. Il l’a dit au cours d’un entretien avec Aminata.com. Dans cet entretien à bâton rompu M. Diawara explique le niveau d’enseignement dans les écoles à travers toute l’étendue du territoire national.

Il souligne par ailleurs que des programmes de rattrapages adaptés au degré de l’évolution des cours dans les localités vont être initiés. Le numéro deux de ce département a aussi lancé un appel aux enseignants. Lisez.

Aminata.com : depuis trois mois, les enfants ne partent pas, une négociation pourrait aboutir aujourd’hui, dites-nous comment vous avez géré cette crise ?

Casimir Diawara : depuis trois mois nous gérons une crise qui a consisté à avoir des départements qui ne fonctionnaient pas suite à l’absence de certains enseignants dans ces écoles suite à la rétention des enfants par des parents qui avaient été très bien informés. Nous nous sommes retrouvés avec un certains nombres d’écoles et d’établissements qui ne fonctionnaient pas normalement.

Il faut reconnaitre que pendant cette crise, il y a eu des points où l’activité scolaire a été reprise très rapidement, dès le mois d’octobre. Là, il faut citer des régions comme la région administrative de N’zérékoré, de Kankan et celle de Faranah qui ont fonctionné relativement bien par rapport aux restes des autres régions et quand on prend les autres régions, il se trouvait des préfectures qui ont bien fonctionné, les enseignants en grand nombre ont continué d’aller à l’école, les élèves en grand ont continué d’aller à l’école. Mais on a constaté qu’à côté, il y a aussi des enseignants qui se sont abstenus, des parents qui retenus leurs enfants, c’est pourquoi ça n’a pas fonctionné à 100%. Aujourd’hui, nous pouvons être fiers de dire que la reprise est de 70%, au minimum au niveau national en ce qui concerne les enfants et dans les classes d’examens, nous pourrons dire que c’est au-delà de 90% que les enfants fréquentent parce qu’ils sont soucieux de leur examen.

Pour les enseignants, nous pouvons dire aujourd’hui que plus de 85% enseignants sont à leurs postes et près de 100% des encadreurs sont à leurs postes. Des mesures ont été prises pour ramener les enfants à l’école et pour ramener les parents à des meilleurs sentiments pour qu’ils comprennent l’intérêt des enfants est à l’école dans la poursuite des études et pour amener les encadreurs pour qu’ils comprennent qu’il fallait qu’ils soient à leurs postes pour que ça marche.

Ces mesures ont consisté en quoi ?

Premièrement, donner la bonne information, parce qu’une toile de rumeurs avait pris le pays, c’était la désinformation. On a voulu faire d’un mouvement dont le caractère hautement politique s’est avéré tout dernièrement, on a voulu en faire un mouvement syndical étant bien convaincu que ce n’était pas un mouvement syndical, ils ne se comportaient comme un mouvement syndical. Un syndicat, quand tu provoques un mouvement social, ils se font sur la négociation mais jamais un syndicat ne dit c’est ma condition, ou on ne négocie pas. Dans la mémoire des syndicalistes en Guinée, la négociation a été toujours l’arme la plus forte entre patronat et syndicat pour pouvoir obtenir des résultats satisfaisant entre les deux parties. Donc, nous nous sommes jurés en informant ensuite en sensibilisant, le département a dépensé assez d’argents dans l’envoie de missionnaires dans les toutes les régions administratives du pays pour que ces missionnaires aillent s’adresser non seulement aux parents d’élèves mais aussi aux enseignants, aux notabilités pour que tous ceux-ci informés puissent entrer dans la sensibilisation en vue de faire comprendre aux parents d’élèves que l’école est l’affaire de la nation. L’école n’est pas l’affaire d’un parti politique, l’école c’est l’usine qui fabrique l’avenir de la nation. C’est-à-dire, c’est là où on éduque nos enfants qui demain prendront le pays en charge.

Donc, vous voulez dire ici que ç’a porté fruit ?

Oui, dans certains endroits, ç’a porté fruit. Mais, il y a eu des préfectures qui ont trainé les pieds parmi lesquelles, nous sommes vraiment désolés. C’est le cas de Télémélé, Boffa, Boké, Lélouma, Labé, Dalaba et Pita. Aujourd’hui, je pense que la conscience a été prise de la part de tous les parents d’élèves parce qu’ils ont vu que dans les autres communes urbaines du pays, dans les sous-préfectures, l’école continuait et que leurs enfants étaient en train d’accuser un retard et en tant que parents conscients, ils se sont dit qu’il fallait remédier à la situation.

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Concernant les enseignants, aujourd’hui, la grève concerne les établissements publics. Alors qui est l’employeur ? C’est la fonction publique. Maintenant, un travailleur qui travaille à droit à son salaire. Un travailleur qui refuse de travailler n’a pas droit au salaire et c’est la règle qui stipule dans le statut des fonctionnaires.

Mais un travailleur a le droit d’aller en grève aussi non ?

Bien sûr, quand vous allez en grève, vous faites grève.  Moi j’ai fait 40 ans de vie syndicale. A chaque fois que j’allais en grève, je me suis attendu aux nombres de jours de grève coupés dans mon salaire. Mais les gouvernements qui se sont succédé en Guinée ont été des gouvernements magnanimes. Il n’y a aucun pays au monde où un seul jour de grève est payé à un gréviste. C’est en Guinée qui avait cette exception et de toutes les fois, quand nous allions au préalable pour les négociations, qu’est-ce que le central demandait quand j’étais syndicaliste ?

1-      Qu’on paye les jours de grève aux grévistes.

2-      Que ceux qui arrêtés pour fait de grève, qu’ils soient libérés.

Les gouvernements qui se sont succédé ces 30 dernières années. Je ne parle pas de gouvernement d’exception. Mais le gouvernement de général Lansana Conté et celui du professeur Alpha Condé, ils ont toujours accédé à ces préalables. Donc, on a fini par en faire une habitude. Un droit alors que ce n’est pas un droit. Vous êtes libre de grever en tant que travailleur, parce que c’est un droit reconnu dans la constitution, mais quand vous grevez, vous arrêtés la machine de production de la nation et pour les heures de travail que vous n’auriez pas effectué, vous consentez ne pas toucher le salaire parce qu’il est indu. C’est raison pour laquelle, quand le pays était passé à l’invite du gouvernement pour négocier une grève sociale, dans le B-a-b-a., on nous a fait comprendre que nous étions les seuls à maintenir cette mesure de payer des grévistes et quand on paye un gréviste, il prend le gout de ne pas travailler parce qu’ils gagnent son salaire et ceci décourage ceux sont en train de travailler qui abandonnent. Alors, il faut appliquer ce qui est dans les textes à l’article 70 du statut de fonctionnaire, il faut l’appliquer et c’est ce qui a été appliqué par le gel de salaire.

Dès qu’on a gelé le salaire, certains ont compris que ce n’est pas un autre individu qui est leur employeur mais que c’est bien l’Etat et qu’ils doivent faire le travail dans l’intérêt des enfants de la nation qui sont les élèves. Et cela est fait, on aime son pays mais quand on s’oppose et qu’on l’on veuille ne pas faire son travail, soulevez les élèves, les mettre dans la rue, c’est qu’on a désormais une autre ambition qui n’est pas du tout syndicale.

 

Est-ce que vous voulez dire par là que ces syndicalistes ont une autre ambition politique derrière ?

Bien sûre, on a vu des leaders politiques dire qu’ils vont sortir pour les soutenir. Moi les 40 ans de vie de syndicat que j’ai vécu en Guinée, mais je n’ai jamais vu un parti politique se déchainer pour supporter le syndicat, ce n’est que cette année.

Alors quand un parti politique se déchaine pour supporter un mouvement, c’est que ce mouvement et ce parti politique ont des liens, ils visent la même chose et le parti politique vise quoi ? La conquête du pouvoir. Le syndicat n’a jamais visé la conquête du pouvoir. Le but du syndicat, c’est l’amélioration des conditions de vie et de travail.

Au-delà de l’appel des politiques, avez-vous des preuves de certains liens entre les politiciens et les syndicalistes ?

Je me fonde de ce qui est visible. Je ne rentre pas dans le domaine de l’occulte parce que je ne suis pas un politicien mais ce que je sais, quand il a été affirmé parce qu’on ne sort jamais bras dessous-bras dessus avec un ennemi, on ne sort qu’avec un alliés. Et quand ils ont décidé de sortir ensemble, les liens ont été affirmés.

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En 2016, on parlait des enseignants qui désertent à l’intérieur du pays, vous avez pris à l’époque des mesures administratives où en êtes-vous ?

Des mesures administratives ont été prises pour que les gens se retournent, certains se sont retournés. Mais cela est toujours possible parce que l’administration est centrale. Mais, avec la perspective de responsabiliser les communautés locales à travers la décentralisation et la déconcentration, la gestion des écoles va être assurée par des communautés rurales, par les districts, ça ne sera plus au niveau central.

Alors, tout engagement qui sera pris envers une communauté locale par un enseignant parce qu’il sera obligé d’aller se recenser pour faire son teste dans un village et quand il sera admis, il sera tenu par un engagement. Tout dépendra des besoins de terrain. Et en ce moment, cet enseignant lié aux autorités locales ne pourra pas se détourner ses bases parce que s’il les accomplie pas, sous contrôle des autorités locales, il risque de ne pas avoir de salaire. Donc, il faut responsabiliser les communautés locales et que la décentralisation descend jusque-là pour que les salaires soient payés à partir de cette base pour que le payement des salaires soit contrôlé à partir de la base pour que l’enseignant, fonctionnaire se sente lié aux structures de gestion des communautés à la base.

Un appel a lancé à l’endroit des parents, des enseignants et des élèves pour mettre fin de cette crise ?

Je suis très heureux de dire aux parents d’élèves, d’abord nous sommes des parents d’élèves, que notre devoir c’est de maintenir les enfants à l’école, notre devoir, c’est de nous informer sainement, de refuser la désinformation, de refuser la manipulation et surtout, nous ne devons pas commettre l’erreur de provoquer le retard des enfants à l’école parce qu’une année perdue pour un enfant coute beaucoup plus chère que l’argent investi par le parent et qui est perdu. Une année de perdre montre beaucoup d’opportunité qui s’en vol en fumée.

Et ceci peut même arriver à viser la vie d’un enfant. Alors nous parent d’élève, nous devons être du côté de l’école parce que c’est l’école qui est le complément d’éducation de nos enfants.

Aux élèves, ce que je peux leur dire, parce c’est sont nos enfants, ils doivent viser à être des citoyens modèles. Aujourd’hui dans la société, ils envient des personnes qui ont des grands postes, qui posent des grands actes patriotiques mais c’est grâce à l’école que ces gens ont pu le faire, c’est grâce à une bonne éducation, qu’ils ont pu devenir ce qu’ils sont.  Il faudrait qu’ils identifient à ces modèles, ces modèles positifs. Pas du tout des modèles qui viennent les révolter contre l’ordre qui est là. Mais plutôt qui les amène à participer à la construction de la société.

Aux enseignants, on ne dira pas grande chose. Mais, c’est tout simplement les inviter à méditer d’avantage sur le rôle d’agent développeur qu’ils ont au sein de la société. Les enseignants sont irremplaçables au sein d’une société. Ils sont la lumière de la société. Il est donc, inacceptable que les enseignants se laissent fourailler, que désormais avant de prendre n’importe quelle décision, qu’ils pèsent non seulement leur intérêt personnel mais qu’ils aussi l’intérêt de la nation. S’ils comprennent qu’une nation peut les conduire à ralentir le développement de la nation, ils doivent comprendre que ce rôle n’est pas patriotique, ce n’est pas de leur. Parce que nous devons comprendre que désormais, la Guinée va fonctionner sur l’application des règles qui sont écrites. Elles ne sont pas écrites pour être abandonnées, celui qui se comporte bien dans son travail, recevra la récompense positive, c’est-à-dire une sanction positive et celui qui se comportera mal recevra aussi sa part de sanction.

Donc, j’invite tous les enseignants à regarder l’avenir, à se joindre pour travailler. A revendiquer ce qui est possible d’avoir, mais ne pas revendiquer pour pouvoir bloquer la marche de la nation.

Entretien réalisé par Alpha Oumar Diallo pour Aminata.com

alphanyla@gmail.com

+224 628 38 98 39

 

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