
Guinée: Entre promesses non tenues et répression, l’avenir du pays s’assombrit (Par Oumar Kateb Yacine)
À la suite de l’expiration de la période de deux ans qui devait marquer la fin de la transition en Guinée, le climat socio-politique du pays s’assombrit davantage. Les promesses de la junte militaire se heurtent à une réalité marquée par la répression, les violations des droits humains et une opposition divisée. Alors que les espoirs d’un retour à l’ordre constitutionnel s’amenuisent, la communauté internationale semble indifférente face à la détérioration de la situation. L’avenir du pays est plus incertain que jamais.
Promesses non tenues et légitimité contestée
Le 31 décembre 2024 devait marquer la fin de la transition politique en Guinée, un engagement pris par la junte militaire, le Comité National du Rassemblement et du Développement (CNRD), en accord avec la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cependant, à la fin de cette échéance, la réalité sur le terrain est bien éloignée des promesses faites. L’opposition, regroupée au sein des Forces Vives de Guinée, a exprimé son rejet de la légitimité du pouvoir militaire, dénonçant une gestion de la transition jugée cavalière et autoritaire. En réponse à cette situation, les Forces Vives de Guinée multiplient les manifestations à l’extérieur, notamment en Europe et en Amérique du Nord, pour attirer l’attention sur la crise politique et les violations des droits humains.
Répression et violence : un régime brutal
Les exactions du régime militaire se multiplient. L’interdiction des manifestations pacifiques, la fermeture des médias, la répression des opposants, ainsi que des actes de violence tels que des assassinats, des arrestations arbitraires et des kidnappings, sont devenus monnaie courante. La manifestation pacifique du 6 janvier, qui visait à revendiquer une transition civile, a été réprimée dans le sang, faisant trois morts, tous des jeunes, et entraînant de nombreuses arrestations. Ces événements tragiques illustrent bien la brutalité d’un régime qui semble déterminé à étouffer toute forme de contestation.
Un discours de façade
Dans ce contexte, le discours de fin d’année du président de la Transition, le Général Mamadi Doumbouya, promettant des élections en 2025, apparaît comme une façade destinée à apaiser les tensions tout en maintenant le contrôle. Les promesses de transition vers un régime civil semblent s’éloigner, laissant place à un climat de méfiance et de désillusion parmi la population.
L’indifférence internationale
L’indifférence de la communauté internationale face à ces dérives est également préoccupante. Alors que les violations des droits humains se multiplient, les réactions des puissances étrangères restent timides, voire absentes. Beaucoup de pays ménagent Conakry pour des raisons de stratégies géopolitiques, ce qui soulève des questions sur l’engagement réel de la communauté internationale à soutenir la démocratie et les droits fondamentaux en Guinée. Les appels à la responsabilité et à la transparence semblent se heurter à un mur d’indifférence, laissant les Guinéens face à leur sort.
Une opposition divisée
Parallèlement, l’opposition guinéenne, bien que désireuse de revendiquer un retour à l’ordre constitutionnel, apparaît divisée et affaiblie. L’exil forcé des principaux opposants, tels que Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, ainsi que la décapitation au sommet de l’ancien parti au pouvoir, ont contribué à cette faiblesse. Les tensions internes et les rivalités entre différents groupes rendent difficile une action unifiée et efficace. Cette fragmentation affaiblit la voix de l’opposition et complique la mise en place d’une véritable alternative politique au régime en place.
Un avenir incertain
Face à cette situation, l’avenir de la Guinée reste incertain. Les espoirs d’une transition pacifique vers un régime démocratique s’amenuisent, tandis que la répression et l’autoritarisme semblent s’installer durablement. Les retards dans l’exécution des différentes étapes, notamment la rédaction d’une nouvelle Constitution qui s’enlise, le recensement général des populations et l’établissement d’un fichier électoral qui tardent à se concrétiser s’ajoutent à l’incertitude quant à un retour à l’ordre constitutionnel. Les Guinéens, qui aspirent à la paix et à la démocratie, se retrouvent piégés entre un régime militaire inflexible et une opposition désunie. La nécessité d’une mobilisation citoyenne et d’un soutien international fort n’a jamais été aussi pressante pour redonner au pays une chance de retrouver le chemin de la démocratie et de la justice.
Un carrefour décisif
Dans ce contexte d’incertitudes, la Guinée se trouve à un carrefour décisif. Les choix qui seront faits dans les mois à venir détermineront non seulement le sort de la transition politique, mais aussi l’avenir même de la nation. Pourtant, les Guinéens méritent un avenir où leurs voix seront entendues et respectées que des vides promesses.
Oumar Kateb Yacine Analyste-Consultant Géopolitique
Courriel : bahoumaryacine777@gmail.com